24 mars 2025
Avec un Code du travail qui a explosé en volume ces 50 dernières années, les entreprises françaises croulent sous les démarches administratives. Le gouvernement, sous l’impulsion de Bruno Le Maire quand il était ministre de l’Économie, tente de rectifier le tir avec un projet de loi censé alléger ces contraintes. Examiné par l’Assemblée nationale après un passage au Sénat, ce texte promet plusieurs changements majeurs pour les entreprises. Mais derrière l’effet d’annonce, que faut-il réellement en attendre ?
Les petites et moyennes entreprises (moins de 250 salariés) dénoncent depuis des années l’enchevêtrement des normes qui leur compliquent la tâche. Le projet de loi prévoit donc un « test PME », censé anticiper l’impact des nouvelles législations sur ces structures. Concrètement, chaque réforme devra être évaluée en amont pour éviter d’ajouter des obligations inutiles aux entrepreneurs.
La Confédération des PME (CPME) réclame depuis longtemps un tel dispositif, soulignant que chaque heure passée à remplir de la paperasse est une heure de moins consacrée au développement de l’activité. Un Haut conseil à la simplification serait même créé pour surveiller l’application de ce test, bien que son efficacité reste à prouver.
Autre réforme importante : les employeurs ne seront plus obligés de déclarer les arrêts maladie de leurs salariés auprès de l’Assurance maladie. Actuellement, cette procédure représente 15 millions de déclarations par an. Dès 2027, un simple envoi du dossier par le salarié et son médecin suffira pour déclencher le versement des indemnités journalières.
Cette suppression est un soulagement pour les services RH, mais elle pose la question du contrôle des arrêts de travail. En l’état, aucune mesure compensatoire n’est annoncée pour éviter d’éventuels abus.
Les entreprises jonglent avec 1 200 formulaires Cerfa, nécessaires pour des démarches allant de la création d’entreprise à la déclaration de TVA. L’objectif affiché par le gouvernement est de supprimer 150 formulaires d’ici fin 2025 et de passer à un système où 80 % des documents seront préremplis par l’administration d’ici 2026.
À l’horizon 2030, les formulaires Cerfa devraient disparaître totalement. Reste à voir si cette dématérialisation se fera réellement au bénéfice des entreprises ou si elle ne conduira qu’à un autre type de complexité bureaucratique.
L’accès aux marchés publics est souvent perçu comme un parcours du combattant, en particulier pour les TPE et PME. La loi prévoit donc la création d’une plateforme unique appelée Place, centralisant toutes les informations sur les commandes des administrations, hôpitaux et opérateurs publics.
Annoncée pour 2028, la mise en place de cette plateforme pourrait finalement être repoussée à 2030, faute d’une infrastructure numérique adaptée. Un report qui ne surprend pas, tant l’État peine à tenir les délais sur ses grands chantiers digitaux.
Les très petites entreprises (TPE) bénéficieront de plusieurs assouplissements alignant leurs droits sur ceux des particuliers :
Ces mesures semblent aller dans le bon sens, bien qu’elles ne règlent pas le problème plus large du manque d’accès au crédit pour les petites entreprises.
Initialement, le gouvernement voulait réduire drastiquement le nombre de lignes sur le bulletin de salaire, passant de plus de 50 à une quinzaine. L’objectif était d’améliorer la lisibilité et d’alléger le travail des gestionnaires de paie.
Mais le Sénat a rejeté cette mesure, estimant qu’elle aboutirait paradoxalement à une information moins claire pour les salariés et à une surcharge administrative pour les entreprises, qui devraient compenser ce manque de détails par d’autres documents explicatifs.
Ce projet de loi contient des avancées réelles, notamment la suppression des déclarations d’arrêts maladie et la réduction du poids des formulaires Cerfa. Mais certaines promesses, comme la dématérialisation totale ou la mise en place rapide de la plateforme des marchés publics, restent sujettes à caution.
Les chefs d’entreprise attendent surtout des résultats concrets : une vraie simplification doit se traduire par moins de temps perdu, moins de paperasse, et surtout moins d’incertitudes juridiques. La création du « test PME » va dans le bon sens, mais il faudra voir si l’administration joue le jeu… ou si elle trouve une nouvelle manière de complexifier l’existant sous couvert de simplification.