30 août 2024
Dans le monde des entreprises, l’externalisation de certaines fonctions annexes, pour se concentrer sur le cœur de métier ou réduire les charges fixes, est une pratique courante. Cependant, cette façon de faire comporte des risques légaux, notamment le délit de marchandage, qui est sévèrement réprimé par le Code du travail pour protéger les salariés.
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Défini par l’article L.8231-1 du Code du travail, le marchandage constitue une forme de travail illégal. Il se caractérise par une opération à but lucratif visant à fournir de la main-d’œuvre, avec pour effet de causer un préjudice aux salariés, de contourner les obligations légales en matière de droit du travail, ou d’éluder l’application de la convention collective. En d’autres termes, il est strictement interdit pour une entreprise de mettre ses salariés à disposition d’une autre entité de manière à les priver de leurs droits dans le but de générer un profit.
Le délit de marchandage se reconnaît à travers 3 critères essentiels.
Premièrement, il y a un transfert du lien de subordination, où le salarié se retrouve sous l’autorité de l’entreprise cliente. Ensuite, l’opération a un but lucratif pour l’entreprise sous-traitante, qui tire profit de la mise à disposition de la main-d’œuvre. Enfin, il y a violation des droits du salarié, notamment par une inégalité de traitement entre le salarié mis à disposition et les salariés de l’entreprise cliente, que ce soit en termes de salaire, de jours de congé, ou de non-application de la convention collective.
Le délit de marchandage est souvent confondu avec le prêt illicite de main-d’œuvre, bien que les deux infractions soient distinctes. Le prêt illicite de main-d’œuvre, défini par l’article L.8241-1 du Code du travail, désigne toute opération à but lucratif dont l’unique objet est la mise à disposition de salariés, en dehors du cadre légal du travail temporaire. En revanche, dans le cas du marchandage, la mise à disposition des salariés n’est pas nécessairement le seul objectif, mais l’opération porte toujours un préjudice au salarié concerné.
Un salarié victime de marchandage peut engager une action pénale en se portant partie civile. Le délit de marchandage est passible de deux ans de prison et de 30 000 € d’amende. Si plusieurs salariés sont concernés, les peines peuvent être aggravées, avec cinq ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende. Ces sanctions sont également applicables si l’infraction concerne une personne vulnérable ou en situation de dépendance. Des peines complémentaires peuvent être prononcées par le juge, telles que la confiscation de biens ayant servi à commettre l’infraction, l’interdiction de sous-traiter de la main-d’œuvre pendant deux à dix ans, ou encore l’affichage ou la publication du jugement dans les médias.
Lorsqu’une personne morale est responsable du délit, l’amende est multipliée par cinq, atteignant ainsi 150 000 € pour un délit de marchandage simple. L’entreprise peut également être frappée de peines complémentaires, comme la fermeture temporaire de l’établissement, l’interdiction d’exercice, ou le placement sous contrôle judiciaire, conformément à l’article 131-39 du Code pénal.
Il est important de noter que l’entreprise cliente n’échappe pas aux sanctions. Étant considérée comme co-auteur du délit de marchandage, elle encourt les mêmes peines que l’entreprise sous-traitante.
Sur le plan civil, le salarié a la possibilité de saisir le Conseil de prud’hommes pour obtenir réparation du préjudice subi. En outre, il peut demander la reconnaissance d’un contrat de travail avec l’entreprise utilisatrice, rétablissant ainsi ses droits en tant que salarié.
Les organisations syndicales représentatives disposent également du droit d’agir en justice pour le compte du salarié, sans avoir besoin de mandat. Elles doivent simplement informer le salarié de l’action engagée, et ce dernier ne doit pas s’y opposer.
Lutter contre le délit de marchandage est essentiel pour préserver les droits des salariés, et les entreprises doivent être conscientes des risques juridiques qu’elles encourent en cas de manquements à la législation.